Il s'agit d'un règlement albertain de 2003 (Operator Licensing and Vehicle Control Regulation, Alta. Reg. 320/2002, art. 14(1)(b) (mod. par Alta. Reg. 137/2003, art. 3) qui impose la photo obligatoire pour tous les citoyens de cette province titulaires d'un permis de conduire.
Les huttérites s'y opposent, en invoquant la liberté de religion, et lorsqu'il s'agit de ce droit, il sera evaluée la croyance, qui doit être sincère qu'une loi ou un règlement va à l'encontre des croyances d'une religion ou groupe religieux quelconque. En effet, les huttérites ont pu demontrer leur croyance sincère que se faire prendre en photo :
[29] Les membres de la colonie croient qu’ils désobéiraient au deuxième commandement s’ils se laissaient photographier : « Tu ne te feras point d’image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre » (Exode 20:4). Ils croient que les photos sont des « représentations » au sens où l’entend le deuxième commandement et ne veulent participer en rien à leur création ou à leur utilisation. Le fait de se laisser photographier pourrait se traduire par une sanction, comme l’obligation de se tenir debout pendant les services religieux.
Les Huttérites sont une commaunauté basée sur un système colonies et de mode de vie rural, tout en exerçant certaines activités commerciales. Ils ont donc besoin de leur permis, pouvant difficilement, selon leurs dires, faire le choix de ne pas avoir de permis tout simplement, pour ne pas désobeir aux ordres divins, à moins d'encourir des dépenses. Ce mouvement anabatiste est originaire du Tyrol, en Allemagne, né au 16ème siècle est fondé sur les enseignements du Nouveau Testament : ses membres, ayant emigré au Dakota pour commencer, parlent toujours un dialecte allemand, rejettent toute forme de violence, même celle reliée à la légitime défénse, et croyent à la mise en commun de leurs biens. Ce sont des être pacifiques, ne commenttant pas de crimes, et ils sont environ 250 en Alberta. Lire plus sur eux ici : Huttérisme-Wikipédia.
Un article du blog du National Post par Colby Cosh apporte plus de lumière sur les huttérites et la présente décision ici.
Voici quelques extraits concernant les faits, les décisions antérieures, et la liberté de religion, tels que rédigés par la juge Abella (dissidente) :
[122] Les membres de la colonie Wilson ont refusé de se laisser photographier. L’Alberta leur a proposé deux solutions de rechange. Selon la première, ils se feraient photographier et leur photo apparaîtrait sur le permis. Cependant, le permis serait placé dans un emballage spécial que le titulaire n’aurait jamais à ouvrir, de sorte qu’il n’aurait aucun contact physique avec la photo imprimée. La photo numérique serait versée dans la banque de données. Selon la deuxième, une photo serait prise, mais elle n’apparaîtrait pas sur le permis. La photo numérique serait seulement versée dans la banque de données servant à la reconnaissance faciale.
[123] Les membres de la colonie Wilson ont rejeté ces deux solutions de rechange parce qu’elles exigeaient toutes les deux qu’ils contreviennent au précepte religieux qui leur interdit de se laisser photographier. Ils ont proposé qu’on leur délivre un permis de conduire sans photo, portant une mention indiquant qu’il ne peut être utilisé à des fins d’identification.
[124] À défaut d’une entente, les membres de la colonie Wilson ont contesté la validité constitutionnelle de la photo obligatoire. Ils ont eu gain de cause devant la Cour du Banc de la Reine de l’Alberta (2006 ABQB 338, 57 Alta. L.R. (4th) 300) et devant la Cour d’appel.
Analyse
[125] L’Alberta concède que la photo obligatoire porte atteinte à la liberté de religion des membres de la colonie Wilson. Elle n’a pas contesté non plus le fait que cette exigence impose un fardeau distinct aux membres de la colonie, comme le juge de première instance l’a souligné :
[traduction] Le procureur général ne nie pas non plus que l’obligation incombant aux personnes qui désirent obtenir ou renouveler un permis de conduire impose un fardeau distinct à celles qui ont ces croyances.
Bref, le procureur général ne conteste pas la prétention que le fardeau imposé aux plaignants par l’alinéa 14(1)b) du règlement de l’Alberta 137/2003 porte atteinte à leurs droits protégés par l’al. 2a) et par le par. 15(1) de la Charte. Il est donc inutile d’examiner la question de savoir si l’alinéa 14(1)b) du règlement de l’Alberta 320/2002, dans sa version modifiée, viole les droits que la Charte garantit aux plaignants. [par. 6‑7]
[126] La liberté de conscience et de religion bénéficie d’une protection constitutionnelle prévue à l’al. 2a) de la Charte canadienne des droits et libertés :
2. Chacun a les libertés fondamentales suivantes :
a) liberté de conscience et de religion;
[127] Dans les arrêts Big M et R. c. Edwards Books and Art Ltd., [1986] 2 R.C.S. 713, le juge en chef Dickson a expliqué l’importance de ce droit, qui repose sur les valeurs de l’autonomie et de la dignité. Dans Edwards Books, il a qualifié la liberté de religion de « croyances intimes profondes qui régissent la perception qu’on a de soi, de l’humanité, de la nature et, dans certains cas, d’un être supérieur ou différent. Ces croyances, à leur tour, régissent notre comportement et nos pratiques » (p. 759). Dans Big M, il a écrit ceci :
Le concept de la liberté de religion se définit essentiellement comme le droit de croire ce que l’on veut en matière religieuse, le droit de professer ouvertement des croyances religieuses sans crainte d’empêchement ou de représailles et le droit de manifester ses croyances religieuses par leur mise en pratique et par le culte ou par leur enseignement et leur propagation.
[L]’insistance sur la conscience et le jugement individuels est [. . .] au coeur de notre tradition politique démocratique. [p. 346]
C’est en raison de l’importance cruciale des droits rattachés à la liberté de conscience individuelle que
la Charte canadienne des droits et libertés parle de libertés « fondamentales ». Celles‑ci constituent le fondement même de la tradition politique dans laquelle s’insère la Charte.
Vu sous cet angle, l’objet de la liberté de conscience et de religion devient évident. Les valeurs qui sous‑tendent nos traditions politiques et philosophiques exigent que chacun soit libre d’avoir et de manifester les croyances et les opinions que lui dicte sa conscience, à la condition notamment que ces manifestations ne lèsent pas ses semblables ou leur propre droit d’avoir et de manifester leurs croyances et opinions personnelles. [p. 346]
Pour moi, il s'agit d'une décision assez inattendue, et les motifs de la majorité (la Cour est partagée, ce qui veut dire beaucoup; personnelement, je suis plutôt d'accord -pour le principe et pour ce que les décisions de la Cour devraient être : des exemples pour les tribunaux inférieurs et pour la société en général, avec J. Abella et j'ai aimé les motifs du J. Lebel, dissident aussi, quant au fameux "test de Oakes", que j'ai étudié au cours de droit constitutionnel 2), rendus par la juge en chef McLachlin font du sens, mais plus dans le contexte du gouvernement actuel, plutôt qu'à la lumière des décisions précédentes de la Cour sur le même sujet (par ex., Multani).
La J. McLachlin pour la majorité mentionne l'objectif du règlement qui prétend porter atteint à la liberté de religion, et l'analyse de l'objectif d'une loi violant un droit garanti par la Charte est très importante, mais cela semble démésuré (les Huttérites sont environ 250 et, d'un autre côté il y a 700,000 albertains qui ne detiennent pas de permis de conduire) : l'objectif poursuivi par ce règlement (de la photo obligatoire impérative et de l’utilisation de la technologie de reconnaissance faciale) étant d’aider à prévenir le vol d’identité :
[15] Le juge en cabinet a constaté que le gouvernement avait pour objectif [traduction] « d’empêcher le vol d’identité et la fraude, ainsi que les divers méfaits que le vol d’identité peut faciliter, et [. . .] l’harmonisation des normes internationales et interprovinciales en matière de photo‑identification » (par. 10), dans le cadre de la délivrance des permis de conduire. Il a conclu que, même s’il était limité, l’objectif d’empêcher le vol d’identité associé au permis de conduire était « urgent et réel » (par.14).
Elle mentionne aussi (par.98) que : " Pouvoir conduire une automobile sur les voies publiques ne constitue pas un droit, mais un privilège.", la J. Abella n'étant pas du tout d'accord :
[167] Laisser entendre, comme le fait la majorité, que les effets préjudiciables sont mineurs parce que les membres de la colonie pourraient simplement faire appel à un tiers pour leur transport ne tient pas compte de l’importance de cette autosuffisance pour l’intégrité autonome de leur communauté religieuse. Quand il faut faire des sacrifices importants pour pratiquer sa religion devant un fardeau imposé par l’État, l’absence de coercition dans le choix de pratiquer sa religion n’existe plus.
[171] J’avoue aussi une certaine réticence à l’égard de la façon dont les juges majoritaires apprécient la gravité de l’atteinte à la liberté de religion. Elle semble sous‑entendre qu’il faut examiner la validité constitutionnelle d’un programme gouvernemental « obligatoire » différemment de celle d’un programme gouvernemental « conditionnel » ou d’un « privilège ». En toute déférence, je trouve ce raisonnement troublant. Il est à la fois inédit et incompatible avec le principe énoncé dans Eldridge c. Colombie‑Britannique (Procureur général), [1997] 3 R.C.S. 624, selon lequel « à partir du moment où l’État accorde effectivement un avantage, il est obligé de le faire sans discrimination » (par. 73).
[172] À mon avis, la question à trancher est celle de savoir si l’acte gouvernemental respecte la Constitution. La réponse à cette question ne devrait pas varier selon qu’il s’agit d’une loi, d’un règlement ou d’un permis. J’ai par ailleurs du mal à comprendre ce qu’on entend par un « privilège » dans le contexte des services dispensés par le gouvernement. Dès l’arrêt Roncarelli c. Duplessis, [1959] R.C.S. 121, la Cour a reconnu la grande importance que peut avoir un permis pour la vie ou la subsistance d’une personne et que le gouvernement doit exercer son pouvoir de délivrance de permis de façon équitable et conforme à la Constitution.
La décision est importante du point de vue du droit constitutionnel, surtout par rapport au test de Oakes (tous les juges passent à travers toutes les étapes de ce test, dans leurs motifs, mais le J. Lebel - dissident-fait l'analyse la plus complète).
Le test de Oakes (de mon cours de drt constit. 2) est utilisé pour déterminer si la démonstration de l'objectif de la loi ou le règlement portant atteinte à un droit ou une liberté fondamentale garantis par la Charte, peut se justifier dans le cadre d'une société libre et démocratique (article 1 de la CCDL : La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique). Il prend son nom de l'arrêt R. c. Oakes (1986), rédigé par le juge en chef Brian Dickson. Le test s'applique lorsque le demandeur a déjà prouvé auparavant qu'une disposition de la Charte a été violée. Il incombe à la Couronne de prouver que sa restriction satisfait les exigences du test Oakes.
Dans l'arrêt R. c. Big M Drug Mart Ltd. (1985), Dickson affirma que les restrictions des droits doivent être motivés par un objectif d'importance suffisante. De plus, le droit doit être limité dans la plus petite mesure possible. Dans Oakes (1986), Dickson creuse davantage la question de la norme lorsqu'un certain David Oakes fut accusé de vente de stupéfiants. Dickson, rédigeant le jugement unanime de la Cour, a jugé que les droits de David Oakes avaient été violés parce qu'il avait été présumé coupable (alors que tout inculpé est présumé innocent jusqu'à preuve hors de tout doute raisonnable du contraire). Cette violation n'était pas justifiée sous la deuxième étape du test, en deux étapes :
- Il doit y avoir un objectif réel et urgent ;
- Les moyen doivent être proportionnels ;
- Les moyens doivent avoir un lien rationnel avec l'objectif (critère dit du lien rationnel);
- Le moyen doit porter le moins possible atteinte au droit en question (critère de l'atteinte minimale);
- Il doit y avoir proportionnalité entre la restriction et l'objectif (critède de la proportionnalité).
Le test se fonde largement sur une analyse des faits, c'est pourquoi il n'est jamais appliqué de façon stricte et a été souvent modelé selon les besoins de la Cour. Une certaine superposition de ces critères est attendue puisque certains facteurs, comme l'imprécision, doivent être pris en compte dans plusieurs articles. Si la loi (au sens large) échoue au test Oakes sur un seul des points ci-dessus, elle est jugée inconstitutionnelle. Dans le cas contraire, la loi contestée réussit le test Oakes et demeure valide. Depuis Oakes, le test a été légèrement modifié.
Voici une partie des motifs du J. Lebel (quant au test de Oakes), car je ne pourrais pas le dire mieux que lui :
[183] Le test énoncé dans l’arrêt R. c. Oakes, [1986] 1 R.C.S. 103, se situe au coeur du droit constitutionnel canadien depuis les débuts de la Charte. La plupart des poursuites fondées sur la Charte sont centrées sur l’application de ce test. L’issue des cas complexes repose souvent sur la question de savoir si la restriction à un droit est justifiée en regard de l’article premier. Dans Oakes, notre Cour a voulu donner un sens et une structure à l’affirmation générale et vague qui figure à l’article premier de la Charte, selon laquelle les droits constitutionnels peuvent être limités dans la mesure où la restriction est justifiée en conformité avec les valeurs démocratiques du Canada. Bien que les tribunaux aient eu du mal à l’appliquer ou à l’interpréter, le test de l’arrêt Oakes a résisté à l’épreuve du temps et il demeure un élément essentiel de l’ordonnancement constitutionnel des droits fondamentaux au Canada.
[186] Il est bien connu que le test de l’arrêt Oakes impose à l’État le fardeau de démontrer l’existence d’un objectif urgent et réel. Il s’agit du volet du test qui porte sur l’objectif. Ensuite, l’État doit répondre aux exigences de la proportionnalité. Le premier élément du critère de la proportionnalité exige la présence d’un lien rationnel entre l’objectif et les moyens. Cet élément du critère porte nettement sur la nécessité ou l’utilité des moyens en rapport avec l’objectif. Une règle de droit qui ne contribue pas, d’une façon ou d’une autre, à la réalisation de l’objectif déclaré ne résistera pas à l’examen constitutionnel. Les tribunaux doivent ensuite examiner les moyens eux‑mêmes en se demandant s’ils portent une atteinte minimale au droit en cause (le critère de « l’atteinte minimale »). Enfin, la Cour devra soupeser les effets bénéfiques et les effets préjudiciables de la mesure (voir P. W. Hogg, Constitutional Law of Canada (5e éd. Suppl.), vol. 2, section 38.8; H. Brun, G. Tremblay et E. Brouillet, Droit constitutionnel (5e éd. 2008), p. 975‑976). Les motifs de la Juge en chef privilégient le dernier élément de ce critère pour justifier le règlement contesté au regard de l’article premier.
[189] La première partie du test de l’arrêt Oakes est étroitement liée à l’analyse de la proportionnalité. L’analyse du lien rationnel commande aux tribunaux de déterminer d’abord si les moyens choisis contribueront de quelque façon à la réalisation de l’objectif déclaré de la mesure législative. À ce stade également, les tribunaux ont rarement jugé les lois et les règlements déficients (Hogg, section 38.10(a)).
[190] Ce constat sur les décisions en matière constitutionnelle ne signifie pas que les tribunaux n’interviendront jamais aux premières étapes ou qu’ils ne devraient pas le faire. Toutefois, cette situation confirme que, après presque 25 ans d’application de l’article premier dans la jurisprudence, la clé du problème se trouve dans ce que l’on pourrait appeler le coeur de l’analyse de la proportionnalité, soit le critère de l’atteinte minimale et la pondération des effets. C’est à ces étapes que les moyens sont remis en cause et que leur lien avec l’objectif législatif est mis à l’épreuve et examiné. C’est aussi à ces stades que l’objectif en soi doit être réévalué au regard des moyens choisis par le Parlement ou la législature. (rien de nouveau ici)
[197] Tout compte fait, dans les motifs de la Juge en chef, l’objectif de la loi est considéré comme s’il devenait inattaquable lorsque les tribunaux entament l’analyse de la proportionnalité. Tout moyen qui ne permettrait pas de réaliser intégralement l’objectif serait exclu de la gamme des solutions raisonnables. À cet égard, les motifs semblent contradictoires. Ainsi, on lit au par. 54 que « [l]es moyens moins attentatoires qui ne lui permettraient pas de réaliser son objectif ne sont pas examinés à ce stade », c’est‑à‑dire au stade de l’atteinte minimale. Une telle approche limiterait considérablement la portée de l’examen judiciaire des mesures gouvernementales et la réduirait à une analyse de la concordance des mesures avec les objectifs. Toutefois, je remarque qu’ailleurs dans ses motifs la Juge en chef semble plus sensible à ce problème. Ainsi, on peut y déceler une indication que les mots « atteindre l’objectif », pourraient vouloir dire en fait chercher à savoir s’il existe un autre moyen d’atteindre l’objectif « de façon réelle et substantielle » (par. 55). Concrètement, ce que cela signifierait en réalité n’est pas aussi clair qu’on pourrait le souhaiter. Néanmoins, ce passage semble indiquer que, même au stade de l’atteinte minimale, l’objectif pourrait devoir être redéfini et circonscrit.
[198] En fait, on peut se demander comment pourrait‑on atteindre un objectif de façon réelle et substantielle sans lui donner une interprétation atténuée. D’ailleurs, une approche différente de l’interprétation et de l’application du test de l’arrêt Oakes semblerait difficile à concilier avec les décisions antérieures de notre Cour. Notre récent arrêt Charkaoui c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CSC 9, [2007] 1 R.C.S. 350, donne un bon exemple d’une interprétation différente de la nature de l’analyse de la proportionnalité.
[201] En outre, le permis de conduire que le gouvernement refuse de délivrer ne constitue pas un privilège. Il n’est pas accordé à la discrétion des gouvernements. Tout aspirant conducteur a le droit d’obtenir un permis s’il respecte les conditions nécessaires et possède les qualifications requises. Un tel permis, comme nous le savons, est souvent d’une importance capitale dans la vie quotidienne et c’est assurément le cas dans les zones rurales de l’Alberta. On pourrait concevoir d’autres solutions à la fraude d’identité qui se situeraient dans une gamme de mesures raisonnables et permettraient d’établir un juste équilibre entre les intérêts sociaux et constitutionnels en jeu. Il est impossible d’atteindre cet équilibre en minimisant les répercussions des mesures sur les croyances et pratiques religieuses des huttérites et en leur suggérant de s’en remettre aux chauffeurs de taxi et aux services de location de camions pour exploiter leurs fermes et préserver leur mode de vie. La sécurité absolue reste probablement impossible à atteindre dans une société démocratique. Restreindre de façon limitée l’objectif de la province de réduire au minimum le vol d’identité ne compromettrait pas indûment cet aspect de la sécurité des Albertains et s’inscrirait peut‑être dans la gamme des solutions de rechange raisonnables et constitutionnelles. De fait, l’objectif déclaré de la province n’est pas coulé dans le béton et n’a pas à être réalisé à tout prix. La mesure attentatoire a été mise en oeuvre dans le but d’atteindre l’objectif hypothétique de réduire au minimum le vol d’identité en exigeant le permis de conduire avec photo. Mais le fait qu’un petit groupe de personnes détiennent un permis sans photo ne compromettra pas de façon importante la sécurité des Albertains. En revanche, le règlement contesté impose un lourd fardeau à un petit groupe de personnes. La photo obligatoire ne constitue donc pas une restriction proportionnée aux droits religieux en cause.
[202] Pour ces motifs et ceux de ma collègue la juge Abella, je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.
Et un autre article sur le site The court
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